Roberto Rossellini. Art et science de l’humanisme

Ce projet, qui clôt la première année de célébrations du Centenaire de la naissance de Roberto Rossellini, s’est donné pour but de promouvoir la connaissance d’aspects aussi importants qu'encore peu connus des recherches et de l'œuvre du grand artiste. Cent ans après sa naissance, Rossellini est en effet connu du grand public presque exclusivement pour sa « trilogie de la guerre » (Rome ville ouverte, Paisa, Allemagne, année zéro). Rares sont en revanche ceux qui connaissent son projet encyclopédique de représenter, à travers le récit audiovisuel et multimédia, les interrelations entre les recherches du passé et du présent des protagonistes de la tradition humaniste.

Dans cette perspective, l'événement est étudié de façon à rendre explicite l'extraordinaire continuité entre le travail accompli par les maîtres de la tradition humaniste et celui qu’a réalisé l’auteur italien pour maintenir vivant, à travers l'étude interdisciplinaire et la réorganisation encyclopédique continue des connaissances, le dialogue entre la recherche scientifique, la recherche artistique et la recherche technologique jusqu’à l’aube de ce nouveau millénaire.

Pour atteindre ce but, on a voulu mettre côte à côte – à travers des documents littéraires, visuels et audiovisuels –
. le point de vue de Rossellini exprimé dans des essais, des interviews, des notes et des présentations télévisées,
. la pensée des humanistes classiques représentée dans leurs œuvres à travers des essais, des dessins et des esquisses
. et enfin, les affinités entre Rossellini et ses interlocuteurs historiques figurées par les personnages des grands humanistes mis en scène par Rossellini.

Les manuscrits, lettres, répertoires, livres annotés, photos de scène, photos de tournage, photos promotionnelles, affiches, scénarios, notes de mise en scène, esquisses, images, bandes filmées et musiques de Rossellini acquièrent, dans ce contexte, une valeur informative mais aussi formative du moment qu’ils sont mis en relation, sur la base des mêmes principes de narration, avec les documents des auteurs et des chercheurs, artistes, hommes de science et encyclopédistes dont Rossellini a voulu, à travers son œuvre, diffuser et continuer la recherche.
Les atouts de force du projet sont la richesse et la variété des matériaux exposés, la multiplicité de corrélations présentées entre les différentes œuvres et enfin, l'énorme puissance formatrice vis-à-vis d'un public dont l'intérêt aille au-delà du domaine strictement cinématographique de l'œuvre rossellinienne.

Visiter cette exposition, c’est plonger dans un voyage multimédia articulé en 8 sections.

La première, « relire et réécrire les classiques », aide à imaginer la bibliothèque idéale de Rossellini à travers le dialogue à distance entre humanistes classiques et contemporains.

La deuxième est consacrée au « génie polyvalent » de l’intellectuel humaniste qui devait, d’après la vision classique, concilier le « savoir de l’art » et le « savoir de la science ». Rossellini lui-même s’appropria cette idée en s’occupant de théâtre, de télévision, de cinéma, de romans et d'essais.

La section suivante, intitulée « la signature de l’auteur », est un voyage au sein du concept complexe d’«identité d'auteur» qui part du passé, quand le nom d'un artiste illustre était associé au travail de tout un atelier, pour aboutir au travail de Rossellini, qui a impliqué directement et indirectement dans son projet de jeunes réalisateurs italiens et français.

« Inventer pour rechercher » : la quatrième section de l’exposition est un parcours visuel entre les machines imaginées par Rossellini et les antécédents technologiques conçus par les grands humanistes dans leurs propres recherches. La capacité de créer de nouveaux appareils et de découvrir de nouvelles applications pour les technologies existantes est assurément un des aspects les moins connus du travail de Rossellini et dont témoigne notamment son enthousiasme envers le potentiel éducatif du média télévisuel qui commençait à se développer dans les années 50.

Cet intérêt marqué pour la didactique est approfondi dans la cinquième section « Éduquer à l’art, éduquer avec l’art ». Rossellini croyait en effet dans l’emploi éthique du cinéma et de la télévision et dans l’utilisation des médias non seulement comme des diffuseurs de connaissance, mais également comme des stimulants pour le développement d’une intelligence critique.

La sixième section aborde le thème de l’ « organisation encyclopédique de la connaissance » et montre comment toute l’œuvre de Rossellini a été conçue sur une structure intrinsèquement encyclopédique. Trois sont les grandes perspectives globales qui, d’après ses propres indications, se croisent dans ses œuvres : l’Histoire, les relations entre les grandes civilisations et les sentiments universels de l'homme.

La section suivante, « la tradition du récit philosophique », illustre le lien entre l’œuvre de Rossellini et l’histoire du récit moral, des fables d’Ésope aux romains philosophiques des auteurs français des Lumières. Des œuvres liées par la « dramatisation » des différentes conceptions culturelles ou scientifiques à travers les dialogues des personnages.

La huitième et dernière section est un voyage dans la « nature inspiratrice » qui part des recherches des grands humanistes, conscients de la complexité de l'âme humaine, pour arriver au néo-réalisme rossellinien qui représente à la fois la complexité humaine et sociale.

Pour compléter la partie multimédia de la visite, la public a la possibilité d'admirer pour la première fois la plus grande exposition sur la longue expérimentation audiovisuelle encyclopédique de Roberto Rossellini, qui rassemble notamment les travaux du photographe Gianni Assenza de « L’età del ferro » à « Il Messia ». L’exposition élabore, sous forme de panneaux thématiques, un véritable voyage dans le temps à travers les découvertes et les inventions, les laboratoires de recherche, les histoires légendaires des protagonistes de la tradition humaniste classique qui ont représenté l’objet privilégié d’étude et de représentation de l’œuvre de Rossellini.